Luxe, calme et volupté : le voyage de Matisse à Baudelaire

Là tout n’est qu’ordre, beauté, calme et volupté, Baudelaire dit dans son œuvre Invitation au voyage. Qui ne serait pas tenté ? Matisse s’est considéré comme une allusion et a transféré dans son œuvre l’univers de l’hédonisme condensé dans ces vers. On a également évoqué la Fondation Beyeler qui, sous le titre du poème de Baudelaire, a rassemblé plus de 70 œuvres de Matisse dans une exposition qui invite au voyage. De belles œuvres, car Beyeler joue dans la cour des grands.

Un jardin luxuriant semble parcourir les espaces ouverts du bâtiment conçu par Renzo Piano à la périphérie de Bâle. Dans ses chambres, Matisse, loin du sud auquel il aspirait, a retrouvé l’ordre, la beauté et le calme, sinon la volupté.

Au milieu du XIXe siècle, Baudelaire, grand amateur de substances psychotropes, se teint les cheveux en vert et publie Les fleurs du mal. Son volumineux recueil de poèmes C’est devenu le livre incontournable pour tout artiste souhaitant faire les choses à sa manière.

Il est vrai que son seul déplacement a été forcé. Sa famille l’envoie dans les mers du Sud pour l’éloigner de la vie bohème de Paris. Il atteint Maurice et décide de retourner à sa dissipation naturelle. Mais il n’est pas nécessaire d’avoir voyagé pour inspirer les autres voyageurs. Baudelaire s’est exploré lui-même, et cela a suffi. Matisse, qui a voyagé, est revenu encore et encore au poème Invitation au voyage dans une recherche esthétique qui l’a conduit à la couleur.

Matisse a vécu la bohème sans renier son statut de bourgeois, et c’est pour cela qu’il a été et est encore critiqué. Il était très clair que Je voulais atteindre une forme d’équilibre, de pureté et de sérénité, exempt de thèmes tristes ou déprimants. Il ne cherchait pas à dénoncer, ni à mettre en scène les conflits de son temps. Son idée était que quiconque contemplerait son œuvre trouverait calme et tranquillité.