Très hôtelier : Le Dolder Grand, la belle vie zurichoise

« Personne ne sait ce qui va se passer demain, c’est pourquoi je le fais aujourd’hui, oh, oh-oh-oh. » Il y a des hôtels où l’on a envie Keira Knightley dans les bras de M. Darcy et des hôtels où l’on se sent un peu plus Mauvais lapin un jeudi idiot, voyons ce qui se passe ce soir à Porto Rico. Le Grand Hôtel Dolder, Commençons par là, c’est les deux choses mais peut-être un peu plus la seconde. La vie dans le canyon, passer un moment de pirate, descendre prendre le petit-déjeuner en peignoir, prendre le petit-déjeuner devant une toile de Dalí, les dîners privé dans des suites avec six inconnus (l’un est venu directement depuis Abou Dhabi), tenues que tu paniques à chaque pas, champagne à midi (cette règle est sacrée à Cadix : elle s’observe après midi), ne sortez de l’hôtel que pour certains se promènent dans Zurich, Mais je ne suis pas très clair non plus à ce sujet.

Et en arrière-plan (toujours) les frênes, chênes et hêtres du mont Zürichberg, on entend un corbeau à l’aube, Le moment est absolument thaumaturgique : Quelques gouttes de pluie tombent sur le lac de Zurich qui domine l’horizon, derrière le lac la solennité des Alpes, de leurs sommets le brouillard descend jusqu’au marais, réveillant la ville endormie. Depuis cet hôtel, tout semble être un rêve. L’arrivée aussi. A l’aéroport de Kloten nous avons pris le tram numéro 6, qui traverse bien les quartiers Seefeld et Hottingen jusqu’au train à crémaillère Dolderbahn, qui atteint la station supérieure d’Adlisberg, est rouge feu, monte lentement, l’arrivée ressemble à un voyage dans le temps. C’est peut-être le cas.

Le Dolder Grand est un château au sens le moins allégorique du terme : un château sur la montagne. La salle est une scène Visconti ; couloirs, espaces et pièces avec des œuvres de Dalí, Magritte, Ernst, Murakami et Miró. L’hôtel n’abrite pas lui-même de musée. L’ensemble de l’hôtel l’est. La conception originale du bâtiment est l’œuvre de Jacques Gros, fils de jardiniers. Cela se voit. Nous avons séjourné dans les nouvelles ailes de l’hôtel, conçues par Norman Foster, entièrement vitré, tout est vert là-bas, des panneaux d’aluminium forment des balustrades, on traverse les pièces, la main glisse sur les murs de pierre qui bercent le spa, on termine la première nuit ici. Personne ne nous accompagne. On part (nage) vers la partie ouverte, Au-dessus de moi le ciel ouvert, je montre sur le firmament étoilé les constellations de Cassiopée, d’Orion, de la Grande Ourse. Il fait chaud et froid à la fois. Je n’oublierai pas cette nuit.

On mange dans le jardin du restaurant Bloom, entouré de fleurs, à l’ombre d’une immense sculpture de Keith Haring, vins naturels, légumes sur la table ; L’après-midi est en apesanteur, ce soir-là ce sera dîner dans la suite, on ne connaît toujours pas le numéro. Un bar japonais pour six (seulement six) convives, Mikuriya, Les mouvements du chef sushi Atsushi Hiraoka ressemblent à une danse ancienne. Je décide d’harmoniser les plats avec des sakés, Junmai Daiginjo, nous dansons dans les couloirs jusqu’à notre chambre, car « personne ne sait ce qui se passera demain ». C’est pourquoi nous le faisons aujourd’hui. C’est pour cela que nous voyageons, que vous dire, pour ces petits instants que nous vivons.

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Les jours de The Dolder s’effacent dans la mémoire, semblent comme une chimère, théâtre d’ombres, comme dans un film de Kenji Mizoguchi. Cette sensation d’apesanteur, collée à l’essentiel, est peut-être ce qui m’a le plus ébloui dans cet incontestable Hotelísimos: car il y a des hôtels (comme ce bel espace, une histoire d’automne sur Zurich) où l’on peut vivre d’autres vies, s’habiller comme Shéhérazade, sois toi sans filtres qui se cache parfois à cause de l’urgence, de la beauté de marcher pieds nus dans la vie, de ne rien retenir, de célébrer toutes les bêtises. Parfois, je pense que c’était un rêve. Peut-être que c’était le cas.